Trent Reznor est décidément un mec étonnant. Alors qu’il passe d’habitude des années à peaufiner les albums de Nine Inch Nails et distribue les tournées au compte-goutte, voilà que depuis la sortie de « With Teeth » en mai 2005, il est constamment sur tous les fronts. Et depuis le début 2007, on frise la surcharge de travail : nouvelle tournée européenne, nouvel album annoncé pour fin avril, sortie d’un DVD live la semaine prochaine, et encore un album prévu dans la foulée pour début 2008 ! Qu’est-ce qui lui arrive, il va mourir bientôt et veut tout boucler musicalement avant ???
Enfin, je ne vais évidemment pas bouder mon plaisir : le DVD s’annonce grandiose, les premiers morceaux du nouvel album « Year Zero » sont déments, et le groupe était à l’Olympia hier, moins de deux ans après le Zénith où je les avais vus pour la première fois en live (ils font un second Olympia ce soir, mais j’y vais pas, argh…). J’avais trouvé le concert de 2005 énorme... j’ai été encore plus emballé par celui de l’Olympia !
NIN est un groupe qui s’accommode mal des salles « moyennes », et qui doit jouer soit dans des grands stades, soit dans des salles (relativement) petites pour donner le meilleur d’eux même. Et l’Olympia, en plus d’offrir cette configuration idéale, possède une des meilleures acoustiques qui soient. Du coup, le son était hier super bien réglé et pétait de partout, sans pour autant être assourdissant. Et puis, pour l’anecdote, on a quand même eu beaucoup moins chaud que dans la fournaise du Zénith !
Pour cette tournée, le groupe n’est pas lié à un album, et pioche donc dans tout son répertoire, jouant peu de With Teeth pour se concentrer sur les albums chouchous du public que sont Broken et The Downward Spiral (bon, c’est pas mes chouchous à moi, mais y’a aussi pas mal de The Fragile donc ça va !). C’est assez rare chez eux : la setlist varie pas mal d’un jour à l’autre, ce qui réserve quelques surprises bienvenues, tout en gardant aussi quelques grands moments très attendus. Par contre, comme de coutume, le groupe a encore changé depuis la dernière fois (mais très peu), Josh Freese remplaçant Jerome Dillon à la batterie, et s’en sortant plus que bien. Sinon, Allessandro Cortini est toujours assez discret derrière ses machines (ce qui ne l'empêche pas d'être excellent techniquement), Jeordie White assure comme une bête à la basse, Aaron North à la guitare fait toujours n’importe quoi en s’agitant dans tous les sens. Et puis il y a Trent, un peu plus calme hier qu’il y a deux ans, mais se lâchant bien en gueulant. Il a même un peu parlé avec le public (pas trop, hein, faut pas abuser !), lâchant quelques blagues (« we’ve got a new album soon, fucking incredible isn’t it ? »), et allant jusqu’à danser à la Robert Smith sur « Only ».
Après une première partie dramatique assurée par The Po-po (du bruit, des mecs qui braillent, des gens qui croient pouvoir allier rock alternatif et gros metal-indus mais ont oublié qu’il fallait écrire des chansons), le groupe débarque sur scène alors que les lumières sont encore allumées. Elles s’éteindront au bout d’un petit moment, et si NIN a mis de côté ses mises en scène grandiloquentes, ils ont su compenser avec un light show impeccable aux effets soigneusement dosés (et une superbe utilisation de lampes soucoupes au dessus de chaque membre du groupe).
Et déjà, c’est le choc, avec une version sublime de Somewhat Damaged à l’intro synthétique méconnaissable. Le début du concert est une avalanche de décibels et le public est immédiatement conquis. Même si les gradins (où je suis) restent assez calmes, on sent bien un emballement dans un public heureux d’être là. Pour moi, c’est l’extase totale, d’autant plus quand le groupe lance ma chanson préférée, Something I can never have, qu’ils nous font cette fois entièrement (contrairement au Zénith !), avec une fin épique qui donne le frisson. Plein d’autres grands moments à noter comme cette 'Ruiner inattendue, l’enchaînement Help me, I’m in hell / Eraser, les versions explosives de Wish et Gave Up, le nouveau single Survivalism très très bon en live, The day the whole… toujours aussi glaçante… Je suis resté scotché et complètement ailleurs pendant tout le concert, jusqu’au final avec bien sûr Hurt, sublime, et l’apothéose de Hand that feeds et Head like a hole'', pendant laquelle le groupe a évidemment tout saccagé devant un public aux anges.
Bien sûr, 1h40 de concert, c’est pas assez long, surtout quand c’est de ce niveau ; en même temps, le groupe mise tout sur l’intensité, et le concert ne souffrait d’aucune baisse de rythme. Quelques chansons surprises jouées jusqu’ici sur la tournée (The Fragile, Into the void, Deep…) manquaient à l’appel et auraient avantageusement remplacé Suck ou Burn dont la qualité un peu inférieure au reste ne justifie pas qu’on les entende tout le temps (y compris au Zénith).
Mais ce ne sont que des pinaillages, histoire de ne pas porter aux nues un concert qui fait quand même certainement partie de mon « Top 3 », et qui était définitivement énormissimantesque !
The X Phil |
Après avoir trouvé le moyen de demander notre chemin à une fliquette, nous arrivons devant l’Olympia. Il n’est que 16h40, le concert commence à 20h, et pourtant une belle foule est déjà amassée devant les lieux. Surtout du côté des membres du fan-club, qui avaient droit d’assister aux balances.
Il fait froid (qui dit concert dit ne pas prendre de blouson car qui dit blouson dit consigne et qui dit consigne dit arrivée plus tard dans le fosse, et donc impossibilité de voir correctement…je reprends ma respiration). J’ai mal au ventre, stressée par ce baptême des oreilles en ce qui concerne ce groupe. Pour oublier l’impression que mes talons s’enfoncent dans le sol parisien tellement j’attends immobile, j’observe mes voisins de file d’attente : un sosie de Trent période With Teeth (à qui j’ai voulu conseiller de se mettre à la gonflette et à la tondeuse électrique histoire d’être à la pointe de la trentattitude), un groupe de mecs chantant les traductions en français de Nin (extrait choisi : « Je suis la voix à l’intérieur de toi-ET JE TE CONTROLE !!! »…vous avez bien sur reconnu MR. Selfdestruct…), une fille qui espère que « The Perfect drug ne sera pas dans la set-list car c’est la pire chanson au monde ». Ca ne risque pas, ma chère…malheureusement.
Il est 18h et les spiraliens ne sont toujours pas rentrés. On apprend finalement qu’ils n’auront pas droit au soundcheck. Ils rentrent, puis c’est à notre tour.
4ème rang, à côté d’une troupe d’américain, du pseudo-sosie de Trent et d’un groupe de pouffes strassées décidées de faire un sit-in pour fumer leur clope, apparemment pas informées de la nouvelle loi sur le tabac.
Arrive the PoPo, les savants fous du rock dansant. Un look à la fois 90’s (flashy), 80’s (le jogging peau de pêche) et 70’s (les lunettes à la Jackson Five). Franchement, je n’adhère pas. Je reste stoïque, espérant que tout le monde fasse de même histoire qu’ils se cassent à l’avance. Je me dis que si Trent les as choisis, c’est pour se moquer, pour faire un canular géant. J’ai honte de mon attitude. Finalement, pas mal de gens dansent, donc je me sens obligée de faire pareil, même si je trouve le son hyper brouillon et le charisme inexistant. Au moins, ils sont sans prétention, ce qui est très rare.
Fin du set. « L’Olympia [nous] offre 20 minutes de pause » . Grrrrrrr, je n’aime pas les cadeaux comme cela, surtout quand ils durent en fait 30 minutes.
NIN arrive. Pendant ce temps, je me faufile au premier rang. Je m’attendais à un déchaînement dans la fosse, rien. Le son de Somewhat Damaged est fort, lourd, gras. Il devient plus léger à la fin du morceau, et ce jusqu’à la fin du show.
Arrive Last, le cadeau surprise de cette tournée.
Sur March Of The Pigs, je retiendrais le saut désormais traditionnel d’Aaron dans la fosse, à quelques mêtres de moi (qui a causé un malaise à une spectatrice :-S) et le bonheur lisible dans les yeux du frontman. Ses gestes sont pleins d’humour, et ça va continuer comme cela.
Ambiance de messe pour Something I can Never Have. Ca fait du bien après la marche des cochons.
Ruiner est magique, Reznor imite Popeye lorsqu’il chante « How did you get so strong ».
Puis arrive Closer. Inutile de vous dire que tout le monde chante, c’est de la folie.
Burn et Gave Up toujours aussi efficaces, Help Me qui instaure un climat oppressant mais terriblement magique dans la salle.
Pouvait-on rêver mieux que Eraser pour lui succéder ? Non. Le son est génial, contrairement à celui du même morceau dans BYIT. Les « kill me » claquent dans l’infini.
Wish, par son dynamisme, contraste avec la morceau précédent. Pendant un refrain, j’ai l’impression que le maître des lieux me regarde. C’est débile, passons ce détail inutile.
The Big Come Down arrive. Une bonne transition avec Wish.
Survivalism n’est dans nos têtes et dans nos disques durs que depuis une semaine, et pourtant tout le monde la connaît déjà. Elle prend toute son ampleur en live. He has got his propaganda. Only transforme l’Olympia en boîte géante par son groove implacable. Après près de 15 morceaux immobiles, les fumeuses de tout à l’heure dansent sur ce morceau. Je crois que c’est le seul qu’elles connaissent. Faut bien commencer quelque part, me dis-je. Sauf que l’une d’elle, avec son bras toujours levé, me gâche la vue. Alors un petit coup de coude bien placé et le tour est joué. Elle se retourne, je me dis qu’elle va m’engueuler. En fait elle a dû croire que je n’avais pas fait exprès, par ce que j’ai eu droit à un gros sourire jusqu’aux oreilles (pourquoi faut-il que je rentre dans des détails aussi insignifiants ?)
Arrivent Suck et the Day The World…, magique.
Je suis contente d’entendre Dead Souls, enfin les « They keep calling meeeeeeeeee » à profusion, on s’en lasse vite. Et ce même s’ils se transforment en « keep on caaaaaaaaaaaalllllllllllling me » parfois.
Vient le traditionnel Hurt, qui arrive à point nommé pour se reposer un peu avant la tempête finale. D’ailleurs, on devrait décréter Hurt hymne national. C’est vrai, tout le monde avait limite la main sur le cœur et la larme à l’œil pendant cette chanson. Je suis sûre que même la Marseillaise n’aurait pas eu un tel succès émotionnel !
Pour finir, The Hand That Feeds, qui confirme l’impression que j’avais comme quoi la plupart des gens m’entourant n’aimaient que With Teeth, et Head Like A Hole, toujours aussi puissante.
C’est déjà fini. Les lumières rallumées, chacun est à la recherche d’une relique. Trent version 2.0, encore lui, réussi à ramasser le médiator d’Aaaron, qu’il me montre gentiment.
En attendant un taxi, on voit les 2 tour-bus aux fenêtre on ne peut plus opaques quittant les lieux. On les retrouve à un feu rouge, stationnés devant un hôtel parisien. Il est l’heure de dormir pour le groupe, afin de livrer un nouvel arrivage de souvenirs magnifiques pour les spectateurs présents le lendemain…
BurningTwig |