![]() |
Article du
magazine |
|
Voici des scans du magazine français Rock Sound 81
Nine Inch Nails Version 2.0
Réunir le temps d'un concert deux figures aussi imposantes que celles de Trent Reznor (Nine Inch Nails) et de Maynard James Keenan (Tool/A Perfect Circle) semblait relever du domaine du rêve.
Pourtant, ce n'en était pas un puisque nous l'avons fait. C'était à Chicago le 21 avril dernier et on ne s'en est toujours pas remis depuis..
Il y a parfois dans la vide de petites choses insignifiantes qui, pour un rien, vous réchauffent le cœur et vous transpose dans un état de joie et de béatitude profonde. Comme par exemple, ce billet qu'on tenait bien fort dans notre main où étaient inscrits ces quelques symboles : « Nine Inch Nails + guest : A Perfect Circle , UC Pavillon, 04/21/00, 8 PM »
COLERE, TRISTESSE, DELIRES…
L'événement avait lieu à l'University of Illinois Chicago, dans un amphithéâtre américain, c'est-à-dire de la taille d'un Bercy de chez nous. Le show était sold-out quelques minutes après son annonce, alors même que les deux groupes repassaient au même endroit la semaine suivante. C'est qu'aux Etats-Unis, on ne rigole pas quand il s'agit de Nine Inch Nails. Pour cette seconde tournée américaine, intitulée « Fragilty V2.0 », c'est avec le nouveau groupe de Maynard Keenan, A Perfect Circle, que la bande de Trent Reznor avait décidé de tourner. Et bien leur en a pris, parce que s'il est un groupe de rock un tant soit peu délicat et original en ce moment sur la scène américaine, c'est bien celui-ci. Cependant, leur jeu scénique tranche
un peu avec leur volonté – par ailleurs clairement exprimée – de sobriété et de bon goût. Parce qu'opter de nos jours
pour des couleurs orange et bleue fluorescentes rendant les dents des musiciens vertes fluos nous paraît légèrement dépassé,
à la limite du risible. La performance de Maynard a également de quoi surprendre. Vêtu d'un costume Prada marron, torse nu, une perruque sur la tête, quelques doigts et ongles peints en noir, une bouteille d'eau à la main, le frontman de Tool est prit d'étranges spasmes ; se déhanche avec difficulté et, bien qu'immobile la plus grande partie du temps paraît ne pas tenir sur ces deux jambes. En clair, et sans vouloir faire de mauvais esprit, il ressemble à un ivrogne. Et, bien que Maynard ait toujours prétendu refuser de passer au premier plan, on ne s'explique pas non plus son arrivée tardive sur scène, une fois ses compères installés, déclenchant alors un tonnerre d'applaudissements lui étant uniquement destiné. Quoi qu'il en soit, et c'est bien là l'essentiel, on est ravi de constater qu'A Perfect Circle tient totalement la route en live et que les morceaux de son premier album, « Mer De Noms », bien que plus brutaux que sur le disque (ceci dû à l'incroyable prestation du batteur Josh Freese),
réussissent à faire passer un puissant courant d'émotions mélangeant colère, tristesse, délires mystiques et emportements lyriques. Le set durera quarante-cinq minutes, la faute à un disque assez court approchant lui-même cette durée , et dix des douze chansons composant le LP (dont le single « Judith » passant actuellement en rotation continue sur les ondes FM nationales en clôture) seront présentées à un public transi.
CA FAIT FRANCHEMENT PEUR
Après un tel déballage de sentiments, une pause s'impose.
Elle s'éternisera quarante minutes, le temps que les roadies
préparent la scène pour l'arrivée de Nine Inch Nails. A vrai dire, on
avait pas spécialement réfléchi sur ce que le groupe de Reznor allait
nous proposer. On s'attendait bêtement à revoir le concert du
Zénith du mois de novembre dernier, avec de simples changements dans la set-
list. Mais c'était à oublier que NIN doit sa position en haut
des charts à un travail acharné et des idées toujours
novatrices. Et ce ut une entrée en la matière pleine de tension qui
célébra son arrivée. Le groupe est là, on l'entend, mais il est
caché derrière un rideau gris d'où se dessinent en ombres chinoises les
silhouettes de ses membres. Comme à Paris, c'est « Somewhat Damaged »,
le premier morceau de « The Fragile », qui a été choisi en
ouverture. Mais quand les rideaux s'écartent, c'est le choc. La scène s'est
allongée d'une trentaine de mètres, rendant l'espace d'expression
immensément vaste, mais surtout, c'est à un tout autre groupe qu'on a
affaire. Car le Nine Inch Nails 2000 n'a plus rien à voir avec celui de 1999.
Là où le concert parisien avait été chaleureux, poli, propre et
presque trop parfait pour paraître sincère, celui de Chicago sera
d'une froideur, d'une saleté et d'une violence qui nous
rappellera d'emblée la tournée de 1994. Fini les tons chauds orangés, c'est
essentiellement un bleu et un vert crus et sombres qui définissent
l'atmosphère de la salle. Les musiciens ont ressortis la
farine (dont leurs habits paramilitaires gothiques sont
badigeonnés) , le maquillage outrancier et leur agressivité
légendaire. En l'espace de deux chansons (« terrible Lie
» et « Sin »), Trent Reznor a déjà balancé quatre fois son pied
de micro au fond de la salle, fait éclater sa guitare contre un ampli, mis son
claviste, Charlie Clouser, à terre et balancé des litres
d'eau sur ses musiciens et la foule. Vu du premier rang, ça fait franchement
peur et on a même du mal a apprécier les morceaux qui suivent («
March Of The Pigs » et « Piggy ») tellement on craint la suite…
LA SALLE HYSTERIQUE
Mais la suite justement, c'est « The fragile » et Trent
Reznor se calme un peu. C'est avec une voix bien plus aïgue qu'à
l'ordinaire et en intensité qui nous arracherait presque les larmes des yeux que
le maître de l'indus nous fait partager les expérimentations
et chansons de son Halo Fourteen : « The Frail », « The Wretched » ;
« La Mer », « The Great Below », « The Way Out Is Through
»… toutes se déroulent avec une aisance et une force presque suréelles. Une
set- list, somme toute, assez peu modifiée, où les seules
nouveautés résident dans l'insertion de « Complication » et
d'un plus vieux morceau : « Throw This Away ». Après un « Closer »
baigné de lumière rouge et un « Head Like A Hole » où le groupe retrouve sa
hargne initiale, le quintette quitte la salle hystérique pour mieux la
retrouver quelques minutes plus tard, avec, en guise de rappel, «
The Day The World Went Away », « Into The Void » (le nouveau
single), « Starfuckers, Inc. » et le classique mais
néanmoins bouleversant « Hurt » en final. On sort de ce concert les yeux
hagards et la bouche-bée, en se sentant bien peu de chose sur
terre. On prend immédiatement rendez-vous le 7 Juillet prochain sur la
scène des Eurockéennes de Belfort, parce que Nine Inch Nails est tout
simplement l'une des meilleures choses qui soit arrivé à la
musique depuis une décennie. Et comme le hurle lui-même Trent Reznor
dans « Somewhat Damaged » : « Fuck the rest and stab it dead ».
Par Sophie Hervier/ Photos Sophie Hervier
L'article est complété par deux photos grand format de Trent et une plus petite.
Pour corriger/compléter l'article :
- il ne s'agit pas de la seconde tournée américaine de NIN,
c'est la première concernant "The Fragile" et la Xémé si on
considére toutes les époques.
- le nombre de places de la salle est de 9300. Petit Bercy donc.
- la set liste donnée dans l'article semblant un peu extravagante,
voici la vraie set list de ce concert :
The New Flesh
Pinion
Somewhat Damaged
Terrible Lie
Sin
March of the Pigs
Piggy
The Frail
The Wretched
Gave Up
La Mer
The Great Below
The Mark Has Been Made
Wish
Complication
Suck
Closer
Head Like A Hole
Rappels:
The Day the World Went Away
Just Like You Imagined
Starfuckers, Inc.
Hurt
Interview retranscrite du magazine français Rock sound n°81 de juin 2000 par Benjamin Six de Dissonance.