![]() ![]() |
Article du
magazine |
|
Voici des scans du magazine Best 303
![]() ![]() ![]() |
La couverture |
BEST N° 303 octobre 1998
Dossier : Sado Maso et Rock'n'roll : Fais moi mal Johnny !
TRAVAUX D'AIGUILLES
L'internationale de la souffrance se porte bien, merci. Entre les soirées Torture Garden, les plus courues de Londres, où tout un chacun va fugacement mettre en vitrine ses déviances, et le petit artisanat international des praticiens SM du rock industriel ou bruitiste, voire pop. Revue de détails.
Indus SM
Une femme hurle... Souffrance ou jouissance ? Un chien grogne, agressif, sans équivoque cette fois. Nous roulons en pleine nuit, pris d'une transe. Dans le retroviseur j'aperçois le passager de la banquette arrière qui, coincé entre les deux enceintes, tourne au blême. Au milieu de rien, il demande qu'on l'arrête et s'échappe de la bagnole comme si nous êtions des vampires prêts à le croquer. Un rien sadiques nous rions. Encore un auto-stoppeur incapable de goûter aux joies perverses du rock industriel.
Dans sa frénésie à transgresser les règles, l'indus a évidemment trempé dans le sad-masochisme. D'ailleurs, le plaisir que l'on peut ressentir à l'écoute de cette musique qui intègre le bruit, est étroitement lié à la douleur. L'utilisation de sons sur-aigus ou d'infrabasses, de cris et de crissements, suscite certes des extases, mais il faut dépasser l'agression.
Si Genesis P. Orridge, pape de l'indus, fondateur de Throbbing Gristle, organise aujourd'hui des raves mystiques à San Fransisco, il a commencé par offrir des shows où les piercings et les plaies sanguinolantes ne faisaient pas dans le latex. Eh oui, dans ce mouvement, le SM dépasse le look. Il ne s'agit pas de flirter avec la perversion, mais de s'y plonger. Dans le début des années 80, Throbbing Gristle aimait enfermer le public avant de lui asséner des concerts où la musique et le visuel avaient de quoi rendre malade.Certains essayaient de s'enfuir en vain. Le rapport de domination atteignait alors son paroxysme.
Dix ans plus tard, Nine Inch Nails, groupe américain néo-indus, commet une vidéo immédiatement censurée dans le monde entier. On y voit un homme se soumettre délibérément à la torture. Une machine autonome le triture, le pique, le pince, le saigne...et finit par le réduire à néant. Le clip s'arrête quand le masochiste se voit transformé en steak haché pour ver de terre.
L'horreur gagne en puissance lorsqu'on sait que l'acteur, un spécialiste de l'auto-mutilation, a subi la plupart des sévices sans trucages. Cette performance au réalisme malsain atteint des dimensions peu justifiables. Si ce n'est qu'elle a quelque chose d'attirant, d'autant plus qu'elle est interdite. Ainsi se construit le mythe.
...
Medhi Boukhelf